La sculpture sur pierre au Cambodge : un héritage qui traverse les siècles

Publié le 1 décembre 2025 à 09:00

Au Cambodge, la sculpture sur pierre fait partie de ces arts qui racontent l’histoire du pays avant même que les textes ne le fassent. Les premières œuvres retrouvées remontent au 1er siècle de notre ère. Fortement influencées par l’Inde, elles représentent surtout des (serpents sacrés), les apsaras (nymphes célestes) et des divinités hindoues, avec des scènes issues de la vie quotidienne ou de récits anciens.

 

Le Temple Banteay Srei, 2024 - Banteay Srei temple, 2024

 

À partir du VIIᵉ siècle, l’art khmer se distingue davantage et les sculptures deviennent plus nombreuses. Quelques siècles plus tard, au IXᵉ siècle, la fondation d’Angkor par le roi Yasovarman marque un tournant majeur. Durant près de 300 ans, environ 1 800 temples et sanctuaires en grès sculpté voient le jour.

Parmi les plus remarquables, le temple de Banteay Srei, construit en grès rose, se distingue par la finesse exceptionnelle de ses sculptures. Ses motifs représentent le monde en trois dimensions mêlant des histoires de légendes hindoues. Malgré sa petite taille, il est souvent considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de l’art khmer.

L’incontournable Angkor Wat représente quant à lui l’apogée de la sculpture monumentale. Son immense chantier a nécessité le transport de millions de blocs de pierre depuis le mont Kulen grâce à un canal de plus de 20 km. Ses murs sont entièrement décorés de mythes hindous, et sa galerie de bas-reliefs, avec 1 200 m² de sculptures, est l’une des plus impressionnantes au monde.

À partir du XVe siècle, avec l’arrivée du bouddhisme theravada et le déclin d’Angkor, la sculpture sur pierre perd de l’importance au profit du bois laqué et décoré. Pendant le régime des Khmers rouge (1975-1979), ce savoir-faire a été presque perdu, faute d’artisans et de transmission.

Aujourd’hui, la sculpture sur pierre connaît un renouveau. La restauration des temples, ainsi que l’intérêt des visiteurs, permettent à de nouveaux artisans de se former et de perpétuer cette tradition ancestrale. Dans certains ateliers, on peut même observer la patience et la précision nécessaires pour tailler le grès, un geste qui n’a presque pas changé depuis des siècles.

 

Bas relief du temple Banteay Srei, 2024 - Bas-relief of Banteay Srei Temple, 2024

Apsaras sculptées sur les murs d'Angkor Wat, 2024 - Apsaras carved on the walls of Angkor Wat, 2024

Stone Sculpture in Cambodia: A Heritage That Has Endured Through the Centuries

 

In Cambodia, stone sculpture is one of those arts that tells the country’s history even before written texts existed. The earliest works discovered date back to the 1st century CE. Strongly influenced by India, they mainly depict sacred serpents (nagas), celestial nymphs (apsaras), and Hindu deities, along with scenes from daily life or ancient stories.

 

Le temple Angkor Wat, 2023 - Angkor Wat temple, 2023

 

From the 7th century onward, Khmer art became more distinctive, and sculptures grew more numerous. A few centuries later, in the 9th century, the founding of Angkor by King Yasovarman marked a major turning point. For nearly 300 years, around 1,800 temples and sanctuaries made of carved sandstone were built.

Among the most remarkable is the temple of Banteay Srei, constructed from pink sandstone, renowned for the exceptional finesse of its carvings. Its motifs depict a three-dimensional world woven with stories from Hindu legends. Despite its small size, it is often considered one of the masterpieces of Khmer art.

The iconic Angkor Wat represents the pinnacle of monumental sculpture. Its vast construction required transporting millions of stone blocks from Mount Kulen through a canal more than 20 km long. Its walls are completely decorated with Hindu myths, and its bas-relief gallery—covering 1,200 m²—is one of the most impressive in the world.

From the 15th century onward, with the arrival of Theravada Buddhism and the decline of Angkor, stone sculpture lost its prominence in favor of lacquered and decorated wood. During the Khmer Rouge regime (1975–1979), this expertise was almost lost due to the lack of artisans and the interruption of transmission.

Today, stone carving is experiencing a revival. The restoration of temples, along with visitors’ interest, allows new artisans to be trained and to carry on this ancestral tradition. In some workshops, one can even observe the patience and precision needed to carve sandstone—a technique that has changed very little over the centuries.